Moins de quatre ans après l’entrée en vigueur du nouveau code de justice pénale des mineurs, l’Assemblée nationale adopte une proposition de loi qui choisit de bafouer un de ses principes. La CNAPE exprime son inquiétude face à cette évolution qui affaiblit la justice des mineurs et s’inscrit dans une logique répressive.
Après de nombreuses annonces et une forte agitation médiatique, l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal, a déposé le 15 octobre dernier une proposition de loi « visant à restaurer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents ». Alors que la commission des lois avait supprimé les dispositions antagonistes aux valeurs fondamentales de la justice pénale des mineurs en France, la séance publique a voté pour un affaiblissement majeur du principe d’atténuation des peines pour les mineurs âgés de plus de seize ans.
En revanche, et heureusement, la proposition initiale d’une comparution immédiate pour les 16-17 ans, sur le modèle appliqué aux adultes, a été rejetée : de nombreux députés ont su rappeler qu’il s’agissait d’une procédure expéditive, qui privilégie l’incarcération au détriment de la prise en compte des parcours de vie et des besoins spécifiques des mineurs.
Dans la continuité de l’avis émis par le Défenseur des droits, la CNAPE déclare que l’adoption de cette proposition de loi, qui doit encore être examinée au Sénat, est un renoncement grave aux principes qui ont fondé la justice des mineurs en France depuis 1945. Elle inscrit la France dans une logique répressive qui va à l’encontre de ses engagements internationaux, notamment la Convention internationale des droits de l’enfant.
En créant de nouvelles mesures, alors que le droit français en prévoit déjà, la nouvelle loi entrave l’intelligibilité de la loi en complexifiant une procédure pourtant simplifiée par la dernière réforme de la justice pénale des mineurs de 2021. Enfin, elle donne de la valeur à une perception biaisée de la violence des mineurs, alors que le taux de réponse pénale aux actes de délinquance est en hausse sur l’année 2023 et qu’aucune donnée officielle ne démontre une augmentation du nombre de mineurs auteurs d’infraction.
La CNAPE constate que, loin d’offrir une réponse efficace à la délinquance juvénile, le groupe présidentiel préfère aggraver la situation des jeunes les plus vulnérables, et n’apporte toujours aucune réponse constructive aux besoins des familles. Au lieu de renforcer un système de protection de l’enfance– aide sociale à l’enfance et protection judiciaire de la jeunesse – en crise, il a choisi la voie obtuse de la répression à l’égard des enfants vulnérables et des parents jugés « défaillants ».
Nous attendons désormais du Sénat qu’il trouve la sagesse de revenir aux principes fondateurs de notre justice pénale des mineurs, et la cohérence à ne pas détricoter des règles de droit construites minutieusement il y a moins de 4 ans.