Des rencontres denses et des échanges forts ont marqué ce déplacement dans les deux îles. Si les problématiques ressemblent à celles de la métropole, leur acuité est indéniablement plus élevée.
Et pourtant, les volontés ne manquent pas, tant de la part des pouvoirs publics rencontrés que des associations œuvrant au plus près des enfants et des jeunes adultes. C’est toutes les parties prenantes qui tentent de faire face aux multiples difficultés, au premier rang desquelles les violences conjugales et leurs effets néfastes sur les enfants. Les actions de sensibilisation et de prévention, bien que déployées en particulier à La Réunion, ne parviennent pas à en réduire l’intensité.
La question de l’effectivité des droits de l’enfant est également centrale. Même si beaucoup a été fait depuis une décennie pour répondre aux problématiques multiples des enfants, bien des efforts restent à faire. En premier lieu, le droit à la protection est singulièrement malmené, notamment à Mayotte. Nombre d’enfants vivent sans la vigilance d’un adulte en proximité, ce qui les expose à tous les dangers. A cet égard, si des réponses ont pu être apportées, elles restent bien insuffisantes tant du point de vue des violences dont ils sont victimes que de celles qu’ils commettent.
Certes, la protection de l’enfance est reconnue comme une exigence première par les pouvoirs publics mais elle est de très loin insuffisante. Outre l’application de la loi qui mérite d’être amplifiée, les modalités de réponse nécessitent d’être adaptées au contexte local, supposant de la souplesse pour favoriser toute l’inventivité déjà à l’œuvre. Nous avons porté ce message auprès des autorités mahoraises afin de concilier le droit commun avec une large palette de réponses susceptibles de s’ajuster aux divers besoins.
Cela vaut pour le droit à la protection de l’enfant mais aussi pour tous les autres droits. Le droit à l’éducation apparaît largement compromis pour bon nombre d’enfants. Faute de justificatifs s’agissant de leur situation administrative, des enfants ne peuvent être scolarisés, d’autres étant empêchés dans la poursuite de leur scolarité. Cette réalité nous est apparue évidente lors des échanges que nous avons eus avec des adolescents et jeunes majeurs, et avec les associations, comme le Village d’EVA, fortement investies auprès d’eux. Pourtant cette réalité n’est pas reconnue par le représentant de l’Etat qui conteste l’importance que nous avons accordée à cette question. C’est pourquoi, la CNAPE envisage de soutenir une étude en vue d’objectiver les données relatives à la scolarisation des enfants à Mayotte.
Les rencontres avec les pouvoirs publics et les associations ont permis de pointer les difficultés mais aussi les réponses apportées et l’envie de travailler ensemble. Les représentants départementaux de La Réunion ont notamment fait part de leur intérêt à développer une collaboration avec la fédération et ses membres en matière de protection de l’enfance. Une coopération qui était au cœur de ce déplacement afin d’échanger avec les acteurs de terrain mais aussi de souligner la grande créativité des professionnels dont pourrait s’inspirer la métropole. A titre d’exemple, parmi tant d’autres, la visite du centre éducatif fermé de Saint-Benoît de l’AAPEJ a démontré tout l’apport de l’éducatif et des séances bien-être à l’égard d’adolescents qui présentent des troubles sévères du comportement.
L’ampleur des problèmes concernant l’enfance est considérable et toutes les initiatives sont à encourager. Face à cette situation, il ressort à l’évidence qu’il faut miser sur un déploiement significatif des dispositifs, que ce soit en matière de prévention, de protection, d’accès à l’école ou à la santé. C’est en mobilisant toutes les ressources locales, en rassemblant tous les acteurs, en favorisant un large éventail de réponses, en accordant un maximum de souplesse aux initiatives qu’il sera possible de relever les nombreux défis qui subsistent. Les potentiels identifiés laissent penser que c’est possible.