Lancés en octobre 2021 par Emmanuel Macron, et conduits sous forme de consultation publique, les États généraux de la justice ont donné lieu à un rapport rendu public en juillet dernier. Le comité des EGJ y évoque les nombreux dysfonctionnements de l’institution judiciaire et la nécessité d’une réforme systémique.
Dans la continuité de cette démarche, le gouvernement a élaboré un plan d’action contenant une soixantaine de mesures pour améliorer le fonctionnement de la justice. Ce dernier a été présenté par le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, à l’occasion d’une conférence de presse qui s’est tenue le 5 janvier. Des annonces ont notamment été faites dans le champ de la justice pénale des mineurs.
- L’extension du partenariat « Justice-Armées »
Les ministères de la Justice et des Armées ont signé un protocole datant du 27 juillet 2021 en vue de favoriser l’insertion sociale et professionnelle des jeunes pris en charge par la PJJ. Dans le cadre de ce partenariat, une première expérimentation portant sur un « parcours d’inspiration miliaire » a été conduite au sein du CER d’Évreux. Grâce à une collaboration avec l’association IRVIN et l’académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan, les jeunes ont bénéficié durant plusieurs semaines d’un séjour d’immersion alliant des activités sportives en pleine nature, un stage de génie écologique et la découverte du monde militaire. L’objectif de la démarche était de remobiliser les participants autour de valeurs fortes, et d’en accompagner certains vers une insertion professionnelle en les orientant vers les métiers civils ou militaires ou vers la préparation d’un titre professionnel d’ouvrier de génie écologique.
Le garde des Sceaux a annoncé l’extension de ce partenariat sur l’ensemble du territoire. La mission sera assurée par des réservistes de l’armée et s’inscrira dans le cadre de la protection judiciaire de la jeunesse. Les structures relevant du secteur associatif habilité seront, par conséquent, impliquées dans le dispositif.
La généralisation du partenariat entre le ministère des Armées et la PJJ est une piste qui peut s’avérer intéressante sous réserve que la démarche soit inscrite dans un projet éducatif construit et porté par des professionnels qualifiés. Le traitement de la délinquance juvénile exige avant tout une approche multidimensionnelle et transversale.
- La poursuite du programme de construction de centres éducatifs fermés
A la demande de l’ancienne ministre de la Justice Nicole Belloubet, un programme de construction de 20 nouveaux CEF a vu le jour en septembre 2018. Ces « CEF nouvelle génération » viennent compléter le dispositif national qui comptait à l’époque 51 structures. Depuis lors, 2 nouveaux CEF gérés par des associations adhérentes à la CNAPE ont ouverts récemment : l’un situé à Epernay dans la Marne (Sauvegarde de la Marne) et l’autre à Saint-Nazaire (Groupe SOS).
A l’occasion de sa conférence de presse, le garde des Sceaux a réaffirmé la volonté politique du gouvernement de poursuivre le programme, rappelant que les CEF sont des « outils efficaces pour éviter la récidive des mineurs délinquants et les remettre dans le droit chemin ».
La CNAPE salue l’engagement politique en faveur de l’accompagnement éducatif et de l’insertion des enfants et des jeunes en conflit avec la loi. Les CEF, qui doivent s’inscrire dans une palette de réponses pénales diversifiées, contribuent pleinement à cet enjeu majeur pour l’avenir de notre société et de notre jeunesse. La fédération rappelait, dans un récent communiqué de presse, les « nombreuses innovations pédagogiques que les CEF ont permis de mettre en œuvre au fil des années » et les « réussites des jeunes qu’un encadrement très soutenu a permis de sortir d’un parcours de délinquance ».
- Les autres mesures
Le ministre s’est félicité de la mise en application du CJPM et notamment de son impact sur la réduction des délais de jugement. Il a également fait part d’un souhait de saisir l’opportunité de la préparation des Jeux Olympiques et Paralympiques pour diversifier les modes d’insertion par le sport.
Le bilan de la mise en œuvre du CJPM présente, par ailleurs, des résultats intéressants : raccourcissement des délais de jugement, baisse tendancielle du nombre de mineurs incarcérés, meilleure prise en comptes des victimes etc. Cependant, la CNAPE a alerté dans une analyse publiée en octobre 2022 sur les conséquences notables de la réforme dans le champ de l’hébergement. Les professionnels du SAH sont aujourd’hui en attente d’un soutien pour absorber les effets de la nouvelle procédure et maintenir le sens de leur intervention éducative.
Enfin, outre le volet pénal, des mesures ont été annoncées concernant l’accompagnement des enfants victimes : la généralisation des UEAPED, la mise en place d’un « programme enfant témoin » visant à préparer l’enfant à la rencontre judiciaire et la publication d’une circulaire pour renforcer la protection des enfants victimes suite aux préconisations de la Ciivise. La fédération ne peut que soutenir les mesures annoncées pour renforcer l’accompagnement des enfants victimes. La généralisation des UEAPED permettront le recueil de la parole de l’enfant dans un lieu sécurisant, protecteur et adapté.