20 ans après la diffusion du rapport de la commission d’enquête sénatoriale « Délinquance des mineurs : la République en quête de respect », le Sénat s’est de nouveau saisi de cette question en publiant le 21 septembre 2022 un nouveau rapport d’information intitulé « Prévenir la délinquance des mineurs – Éviter la récidive ».
Les rapporteurs Madame Céline Boulay-Espéronnier (Les Républicains), Monsieur Bernard Fialaire (Rassemblent Démocratique Social et Européen), Madame Laurence Harribey (Parti Socialiste) et Madame Muriel Jourda (Les Républicains) y formulent 14 recommandations articulées autour de 4 grands axes en lien avec l’état des connaissances sur le phénomène de délinquance des mineurs, la lutte contre le décrochage et les violences scolaires, les modalités de réinsertion et le recours aux apprentissages pour éviter la récidive.
La CNAPE souscrit en partie aux conclusions du rapport axées majoritairement sur les enjeux de prévention. Elle salue à ce titre les recommandations portant sur :
- Le traitement du décrochage et des violences scolaires qui constitue, bien qu’il ne soit pas le seul, un levier pertinent de prévention des actes de délinquance. Ces derniers demeurent néanmoins complexes, multifactoriels, et appellent à une politique publique ambitieuse et des réponses individualisées ;
- La préparation de l’issue de la prise en charge qui relève d’une question majeure pour tous les champs de l’action sociale et médico-sociale. Elle se pose par ailleurs en des termes particuliers en matière pénale, du fait notamment de la temporalité courte des accompagnements mis en œuvre, suivis par conséquent d’une phase critique pour les jeunes en quête d’autonomie ;
- Le recueil de données statistiques fiables sur la réalité de la délinquance des mineurs et sur l’efficience des réponses apportées qui est, par ailleurs, une préconisation portée de très longue date par la fédération auprès des pouvoirs publics.
La CNAPE signale toutefois son désaccord concernant la recommandation n° 10 des rapporteurs préconisant de « réorienter les moyens destinés à la création de nouveaux centres éducatifs fermés vers le financement de la mise en œuvre des mesures existantes ».
Les centres éducatifs fermés cristallisent depuis près de 20 ans les tensions relatives à l’accompagnement des jeunes en conflit avec la loi. Bien qu’en proie à des dysfonctionnements dans certains territoires, ces structures sont une réponse pertinente pour des jeunes à problématiques multiples. Elles accueillent quotidiennement des profils nécessitant un cadre contraint et contenant, et pour lesquels les centres éducatifs traditionnels ne sont pas adaptés.
La CNAPE prône une diversité des réponses, et les CEF en font légitimement partie. Au-delà des approches dogmatiques, il s’agit de mettre en lumière les bonnes pratiques et les facteurs nécessaires à la réussite de l’accompagnement, qui sont des facteurs clé de réinsertion des jeunes accueillis dans les CEF : redonner du sens au placement en veillant à des admissions basées sur un projet éducatif cohérent, réfléchir à la localisation des sites et leur ouverture sur l’extérieur, ou encore revaloriser la filière socio-éducative pour pallier les difficultés de recrutement.
Le programme de création de 20 nouveaux CEF, annoncée en 2018 par l’ancienne garde des Sceaux Nicole Belloubet, prend appui sur un fort engagement associatif. Il constitue une opportunité pour repenser et réévaluer ces dispositifs qui ont fait leur preuve à bien des égards auprès d’un public particulièrement difficile.